Le Greenhouse Gas Protocol, ou Protocole des GES (gaz à effet de serre), constitue une référence mondiale en matière de comptabilité carbone. À l’image du Bilan Carbone® en France, son succès repose sur une méthodologie intersectorielle rigoureuse. Le GHG Protocol est notamment connu pour son « Corporate Standard », ainsi que pour la création de ses 3 scopes d’émissions. Cet article revient sur la nature de cette initiative, ainsi que sur les grandes étapes de sa méthode de comptabilisation des émissions de GES.
Son objectif est de concevoir des méthodologies d’inventaire des émissions de GES acceptées dans le monde entier. Le protocole promeut une comptabilité carbone rigoureuse, transparente et dont les rapports restent comparables dans le temps. Il vise également à réduire le coût d’un inventaire des émissions de gaz à effet de serre et à en simplifier la réalisation. Le Greenhouse Gas Protocol est aujourd’hui largement reconnu comme l’ensemble de référentiels de comptabilité carbone le plus utilisé au niveau international.
Les référentiels du Protocole GHG s’adressent à un grand nombre d’acteurs, d’organisations et de territoires. Voici une liste non exhaustive des entités qui peuvent bénéficier de l’utilisation de ses différents outils et standards :
Les ressources du GHG Protocol peuvent être utilisées dans de nombreux cas de figure. Elles permettent de comptabiliser les gaz à effet de serre émis lors d’opérations, mais aussi tout au long de la chaîne de valeur. Les standards du protocole servent aussi à estimer les effets de politiques ou encore de projets d’atténuation sur les émissions de GES. Bien entendu, des scientifiques et universitaires utilisent également les outils du GHG Protocol pour faire avancer la recherche.
Le GHG Protocol a été fondé en 1998 par deux acteurs importants du développement durable :
La création de cette initiative est le résultat d’un constat partagé par ces deux entités. Chacune de leur côté, elles concluent à la nécessité de créer un cadre standardisé pour la comptabilisation des émissions de GES. Ce besoin sera notamment exprimé au sein du rapport Safe Climate, Sound Business, publié par le WRI en 1998. C’est dans ce contexte de réflexion commune qu’une rencontre a lieu entre les deux organisations fin 1997. Le partenariat qui deviendra le GHG Protocol est alors acté.
Pourtant, au fil des années, de nouveaux standards, guides et outils sont développés et diversifient le champ d’action de l’initiative. L’adoption de ces méthodologies se généralise, alors que les études faisant état de l’urgence climatique se multiplient. Le GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) publie notamment son rapport spécial « Réchauffement planétaire de 1,5 °C » en 2018.
La méthodologie du Protocole des gaz à effet de serre est relativement proche de celle de la norme ISO 14064. La présentation suivante constitue une simplification des différentes phases de comptabilité carbone décrites dans le Corporate Standard. Voici donc les 7 principales étapes du GHG Protocol à connaître.
Cette étape consiste à décider quels sites, installations et opérations seront comptabilisés au sein de l’inventaire carbone. L’entreprise ou l’organisation peut choisir entre les approches « part du capital » et « contrôle » pour délimiter ce périmètre :
Lors de cette phase, on catégorise les différents types de gaz à effet de serre émis dans le cadre de ses activités. L’entreprise ou organisation choisit ensuite les scopes (1, 2 et 3) à prendre en compte lors de la mesure et de la déclaration de ses émissions.
L’entreprise ou organisation doit déterminer l’année à utiliser pour comptabiliser ses émissions de GES. Il peut s’agir d’une année récente ou particulièrement représentative de l’activité de l’organisation. Mais il est aussi possible d’utiliser un niveau d’émissions de gaz à effet de serre moyen, calculé sur plusieurs années. L’année de référence utilisée dans le cadre du GHG Protocol servira à mesurer les progrès de l’entreprise au fil du temps.
Le Corporate Standard utilise des méthodes de calcul qui suivent les guidelines du GIEC publiées au moment de sa dernière révision en 2004. Cette étape comprend la collecte des données d’activité de l’entreprise et le choix des facteurs d’émissions à utiliser. L’organisation peut ensuite se servir des outils de calcul sectoriels et intersectoriels de l’initiative pour mesurer ses différentes catégories d’émissions.
Cette étape du GHG Protocol consiste à assurer la qualité des données de son inventaire de GES. Il s’agit de prévenir et de corriger les erreurs et imprécisions, afin que les informations recueillies se révèlent réellement utiles. En fonction de la raison qui pousse l’entreprise ou l’organisation à réaliser son bilan d’émissions de GES, cette étape peut être cruciale.
C’est notamment le cas lorsque l’inventaire se fait dans le cadre d’un programme de reporting carbone volontaire ou obligatoire. En effet, un cahier des charges précis accompagne généralement ce type de procédure. Cette phase comprend l’implémentation d’un système de management de la qualité, ainsi que la gestion des incertitudes.
Cette étape correspond à la comptabilisation des potentiels projets de réduction des émissions de GES. Le GHG Protocol guide les entreprises et les organisations sur la manière de prendre en compte leurs différentes actions de contribution carbone.
La dernière grande étape du GHG Protocol consiste à rédiger un rapport détaillant les conclusions de l’inventaire de GES. Le Corporate Standard détaille les conditions pour qu’un inventaire réalisé selon ses directives soit publié. Le Protocole GHG propose ensuite des conseils pour définir des objectifs de réduction de ses émissions de gaz à effet de serre.
La méthode de comptabilité carbone du GHG Protocol prend actuellement en compte 7 gaz à effet de serre distincts :
Les standards du GHG Protocol se réfèrent aux gaz couverts par le Protocole de Kyoto, mais aussi par la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC). La liste des gaz à effet de serre à comptabiliser dans le cadre des référentiels du Protocole GHG peut donc évoluer.
Le Protocole des gaz à effet de serre est le premier à avoir introduit la notion de scopes d’émissions. Il définit 3 scopes :
En catégorisant les émissions de GES selon leurs sources, il est possible de mieux appréhender ses postes d’émissions importants. Une entreprise ou un territoire peut ainsi gérer plus précisément ses risques et ses opportunités de transition bas carbone.
Si les standards du Protocole des GES jouissent d’une grande notoriété, ils sont loin d’être les seuls à proposer une méthodologie de comptabilité carbone. Bilan Carbone®, norme ISO 14064, bilan de GES réglementaire français: différentes approches coexistent pour réaliser un inventaire de ses émissions. Afin de trouver la bonne démarche pour son organisation, il est important de se familiariser avec les méthodologies disponibles.
Le GHG Protocol fait figure d’autorité au niveau mondial. Il est donc particulièrement approprié pour les entreprises ayant des activités à l’international. De nombreuses initiatives de transition bas carbone se reposent d’ailleurs directement ou indirectement sur ses standards. Les grandes entreprises faisant du reporting carbone via le CDP (anciennement Carbon Disclosure Project) utilisent généralement le GHG Protocol pour inventorier leurs émissions.
La SBTI (Science Based Targets initiative) se base également en partie sur les ressources du protocole pour la création d’objectifs de décarbonation. Certaines régulations internationales font elles aussi directement référence aux guides et standards de l’initiative. C’est le cas, par exemple, de la directive européenne CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive). La norme internationale ISO 14064, plus générique, dispose elle aussi de sa propre méthode de calcul des émissions de GES.
Au niveau national, certaines entreprises sont obligées de comptabiliser et de déclarer leurs émissions périodiquement. Elles ont la possibilité d’utiliser l’approche française réglementaire dite « BEGES » pour réaliser leur bilan GES. Mais un grand nombre de sociétés choisissent une autre méthode, basée sur une démarche volontaire, pour inventorier leurs émissions. En effet, le Bilan Carbone®, publié 3 ans après le Corporate Standard du GHG Protocol, est l’outil de référence national en comptabilité carbone.
Portée et diffusée par l’Association pour la transition Bas Carbone (ABC), la méthode Bilan Carbone® se veut plus exigeante et complète que l’approche réglementaire. Compatible avec d’autres outils de transition climatique, elle peut également être utilisée dans le cadre d’un bilan GES obligatoire. Bien que son exposition au niveau international soit moins importante que celle du GHG Protocol, la méthodologie Bilan Carbone® est elle aussi reconnue à l'étranger.
Le Bilan Carbone® et le GHG Protocol proposent des méthodologies relativement proches. Ils se basent tous les deux sur les recommandations du GIEC et partagent des notions communes. Les deux approches sont également cohérentes avec la norme ISO 14064.
S’ils sont similaires sur de nombreux aspects, le Bilan Carbone® et le GHG Protocol présentent cependant plusieurs différences. La méthode diffusée par l’ABC est réputée plus complète. Le Bilan Carbone® exige notamment une prise en compte totale des émissions de scope 3, ainsi que la mise en place d’un plan d’actions pour réduire ses émissions de GES. Dans le cadre du GHG Protocol, ces mesures sont facultatives.
Le tableau suivant liste les éléments des rapports de synthèse qui sont traités différemment par les deux méthodes.
Éléments constitutifs des rapports de synthèse |
Bilan Carbone® |
GHG Protocol |
Description de l’organisation |
Oui |
Non |
Nomination d’un pilote |
Oui |
Non |
Cartographie des flux |
Oui |
Non |
Prise en compte des autres émissions indirectes (scope 3) |
Oui |
Facultatif |
Incertitudes et mesures de réduction |
Oui |
Facultatif |
Exclusion de sources, sites ou activités |
Non |
Oui |
Motifs d’exclusion de postes d’émissions |
Non |
Oui |
Méthodologie de quantification choisie |
Non |
Oui |
Justification de changement de la méthodologie de quantification |
Oui |
Non |
Description des facteurs d’émission (FE) et potentiels de réchauffement global (PRG) utilisés |
Oui |
Non |
Risques et opportunités de transition |
Facultatif |
Non |
Stratégie GES de l’organisation |
Facultatif |
Non |
Plan(s) d’actions |
Oui |
Facultatif |
Exigences du programme GES auquel est soumise l’organisation |
Facultatif |
Non |
Point de contact |
Non |
Facultatif |
Source : Guide méthodologique de la version 8 du Bilan Carbone® (chapitre 5.1.2).
Il est important de noter que, malgré ces différences notables, le tableur maître du Bilan Carbone® peut être utilisé pour répondre à d’autres standards. En effet, les entreprises ont la possibilité de faire des exports au format du GHG Protocol, mais aussi de l’ISO 14064, du CDP ou du BEGES.
Au-delà de la méthode choisie par une organisation, c’est avant tout le sérieux avec lequel elle l’applique qui permettra l’obtention d’un inventaire de qualité. Pour réussir son exercice de comptabilité carbone et amorcer une réelle transition au sein de son entreprise, un haut niveau d’expertise est indispensable.