À l’occasion du concours de photo "Énergies Positives”, Hellio a souhaité mettre en lumière un des membres du jury. Qui de mieux que la photographe Karine PAOLI, présidente de la biennale PARISARTISTES # et du concours Objectif FEMMES dont Hellio soutient les engagements et les projets depuis 2014 ?
« L’acte fondateur de ma création artistique est le cadeau que me fit mon père le jour de mes 12 ans, mon premier boîtier. Il permit à l’adolescente que j’étais de transformer sa révolte en création », voici comment Karine Paoli débute sa biographie.
Nous avons voulu savoir qui se cache derrière cette adolescente révoltée devenue femme, mère, photographe ? Avec une énergie débordante et une ferme douceur, elle nous parle de ses actions centrées autour du combat qu’elle a chevillé au corps : le respect des femmes.
Rencontre avec une femme passionnée et passionnante.
Crédit photo : ©CarolineMorceau
Objectif FEMMES est une exposition dédiée aux femmes photographes. Elle est annuelle et suite à leur inscription, leur candidature est soumise aux commissaires d’expositions (Valérie Paumelle et Nathalie de Frouville), pour leur permettre d’être exposées à la mairie du 9ème arrondissement pendant 15 jours. Un jury d’exception désigne la lauréate de l’année lors de la soirée du vernissage.
La crise sanitaire nous a obligés à reporter le vernissage de l’édition 2020 au 9 septembre 2021. Nous croisons les doigts pour que ce bel événement ait enfin lieu dans les magnifiques salons Aguado de la Mairie du 9ème arrondissement où Delphine Bürkli nous accueille depuis 2016. Nous avons actuellement 5 femmes photographes sélectionnées pour cette 5e édition.
Je travaille en amont pour réaliser une première exposition virtuelle. Nous avons digitalisé, les salons Aguado et nous allons y exposer une photo de chaque femme photographe pour donner envie au public de venir voir l’exposition en réel, une fois que cette crise sanitaire nous en donnera l’opportunité. Très vite, je l’espère !
Karine Paoli : Il y en a beaucoup en effet. Mais ce que je veux dire, c’est qu’il n’y en a pas assez par rapport au nombre d’élèves qui sortent des écoles et qui « disparaissent » de la scène artistique… Elles ne sont pas mises en lumière dans les expositions et dans la profession en tant que photographes.
C’est un milieu qui est très axé sur les hommes. De part, il est vrai par le poids du matériel, ou encore par les débuts de la photographie de guerre où sur le terrain, les femmes photographes se faisaient rares.
Même en reportage, j’ai pu assister à des choses qui ne sont pas convenables : je me prenais des coups de coude dans les côtes pour que ces messieurs aient la meilleure place pour réaliser le plus beau cliché. C’est impossible de tolérer cela à notre époque !
Crédit photo : ©KarinePaoli 2021 pour Objectif FEMMES 2019
Je ne me laisse pas faire car je ne supporte pas cette différence. Et, cela peut aussi se ressentir sur les commissariats d’exposition, très peu de femmes sont sur ce secteur-là. Même si cela change depuis quelques années.
J’ai été commissaire d'exposition au Grand Palais en tant que femme photographe, les hommes me tenaient tête parce que j’étais une femme et que je n’avais pas le droit de mettre telle photo qui leur appartenait où je le souhaitais. Je me suis retrouvée face à un monsieur qui ne faisait pas loin de deux mètres qui me disait : « Mais non tu ne mettras pas ma photo où tu l’as décidé ! » A quoi j’ai répondu sans sourciller : « Si tu n’es pas content de l’emplacement, tu prends ta photo et tu peux t’en aller. » Il a laissé sa photo dans un coin, je l’ai donc accroché à l’endroit que j’avais choisi et elle y est restée pendant toute l’exposition.
Voilà, c’est cette obligation de devoir toujours justifier nos choix qui n’est plus acceptable aujourd’hui !
Et dans le monde de la photographie, ce n’est pas encore le cas, j’y travaille certes grâce et à travers PARISARTISTES # pour vraiment dire : « Stop ! Arrêtons ! » Les Femmes ont aussi leur place, donnez-nous notre chance !
Nous avons tous des messages importants à faire passer. Que nous soyons hommes ou femmes, nous avons un devoir de respect les uns envers les autres. C’est pour ça que je donne, la possibilité dès que je le peux, de faire travailler les femmes photographes sur des évènements, des shooting produits, ou autres propositions afin qu’elles puissent exercer le métier qu’elles ont choisi.
Karine Paoli : Oui. C’est un combat de tous les jours.
Crédit photo : ©KarinePaoli 2021 – « Reflets d’Eve - Miss Opéra
Mais, il y a une sorte de tabou qui fait que l’on tourne la page. On n’a pas forcément envie de raconter. Pourtant, il faudra bien, le moment venu, donner une impulsion pour oser dire les choses. Pour percer l’abcès et dire « Non, plus jamais ça ! ». On agit et on change les façons de penser. Oui, il y a des femmes photographes talentueuses qui ne demandent qu’à montrer leur travail, pour être collectionnées, pour être sur le terrain.
Même si les choses changent, il faut le reconnaître depuis quelques années, je trouve que cela ne va pas assez vite. Posez-vous la question : Si je dois faire appel à un photographe, qui ai-je dans mes contacts ? Homme ou femme ? Vers qui je vais aller instinctivement ?
Pour terminer sur cette question, je pense aussi que toutes les mamans qui ont la chance d’avoir des petits garçons doivent les éduquer en leur inculquant le respect vis-à-vis des petites filles qui sont dans leur classe. Dès le début il faut qu’ils comprennent qu’elles seront leur alliée et que leurs différences donneront une belle alliance et non une concurrence. Le respect commence ici, dès le premier âge, c’est important. Et mon fils sait combien je tiens à cela et je pense qu’il a, du haut de ses 12 ans, compris le « combat » de sa maman passionnée et tout de même un peu engagée, à défendre la cause des femmes et des femmes photographes en particulier…
Karine Paoli : Oui absolument, je montre à travers mon travail artistique de photographe une vision très personnelle de ce que j’appelle « Le Beau » et ce sans aucune prétention.
Je sais que l’on a tous une vision différente du « Beau » et je profite du médium qu’est la photographie pour donner la mienne : je vois souvent des choses que les gens ne voient plus forcément au quotidien, par habitude ou manque de temps… Parfois quand je suis en balade avec des amis, je prends des photos et il m’est arrivé de surprendre un ami, se mettre derrière moi et reprendre la même photo… Car il n’avait pas vu ce que j’avais photographié la première… Alors, au début ça m’énervait, et puis après, je me suis dit que si je lui permettais de « Voir » finalement, j’en étais heureuse…
Cela peut être aussi bien un reflet dans « un miroir de Paris (ou New-York) », un visage dans le métro ou encore tout simplement, une jolie petite plante qui pousse dans une fissure d’un mur, d’un « PoeticHeart HugMe » graffé à l’improviste, etc.
Au quotidien, c’est ce que j’aime apporter. C’est un peu comme si j’avais un troisième œil qui se libère grâce à mes appareils photo, mon smartphone ou encore à mon calepin - que j’ai toujours avec moi pour saisir des tranches de vie que j’ai envie de partager, un jour lors d’une exposition.
Karine Paoli : Quand on connait un peu mon travail, il y a souvent une double lecture, que j’aime, ou pas, donner au spectateur. Car, c’est aussi ça la magie de l’art. C’est l’interprétation personnelle que l’on va faire d’un tableau, d’une photo, d’une sculpture. Il faut, certes, donner certains codes mais je ne suis pas sûre qu’il faille tous les donner. J’aime beaucoup l’idée que les gens puissent se demander ce que l’artiste a voulu faire passer comme message, comme idée à travers son œuvre. Et si l’on donne trop d’indications, je pense que la réflexion sera moins spontanée. Laissons une part de magie…
Karine Paoli : C’est une vaste question, même si j’en suis convaincue. Nous n’avons pas la même sensibilité que celle des hommes, même si elle est très complémentaire. Ce n’est pas du tout un propos contre les hommes. Bien au contraire, car il y a de très belles collaborations aussi bien professionnelles qu’artistiques, qui sont faites entre des hommes et des femmes et inversement, et ce depuis toujours.
Crédit photo : ©KarinePaoli 2021 – « Miroir de Paris »
Cela serait intéressant de donner une photo à prendre d’un objet, en laissant libre cours à l’imagination de l’homme et de la femme avec un même appareil et de voir l’angle différent travaillé. Ça pourrait être une idée d’un prochain concours. On verrait justement cette différence. Car nous avons tous, une histoire et une carte du monde unique, qui nous est propre, qui fait notre richesse personnelle et dans laquelle les artistes puisent souvent pour réaliser leurs créations.
Karine Paoli : J'aime beaucoup le travail de Robert Mapplethorpe. Il avait une vision assez forte dans les portraits qu’il réalisait, même s’il est très controversé - car certaines de ses photos ont choqué à l’époque de leur sortie dans la société puritaine américaine.
Les photos de Peter Lindbergh me touchent aussi beaucoup, ses photos des mannequins femmes habillées en homme, ses mises en valeur de ses canons de beauté qu’il a redéfini avec son œil, sa perception du « Beau », de son « Beau »… Ce serait ceux-là, même s’ils sont complètement différents dans leur style.
Karine Paoli : Dora Maar, forcément ! Et, toutes les femmes que j’ai exposées aussi à Objectif FEMMES. Elles ont toutes un travail différent, mais c’est un travail que j’apprécie à chaque fois et qui m’a permis de les connaître un peu plus, chacune à des instants précis de ma vie et de la leur. Ce sont les belles rencontres qui font que nous sommes comme une grande famille de cœur !
Karine Paoli : La quintessence de cette rencontre a été faite grâce à PARISARTISTES # qui est un projet que je porte depuis 2014, dédié à la mise en lumière des artistes parisiens au début puis internationaux depuis 2016.
C’est une artiste que m’a fait rencontrer Claire Gagnaire (Secrétaire Générale de Hellio), en me disant : « Va voir Claire elle à une sensibilité artistique et son entreprise soutient les artistes et les belles aventures humaines ». C’est donc grâce à Géraldine Vilaseca, grande artiste sculpteur que j’ai pu connaître Hellio.
J’ai aussi pu rencontrer leur belle équipe. Claire Gagnaire fait d’ailleurs partie du jury d’Objectif FEMMES et de PARISARTISTES #.
Pour moi, Hellio est une belle marque et je suis heureuse de faire partie du jury du concours photos « Énergies Positives » . J’ai hâte de voir les futur.e.s photographes ! Il me tarde de voir leur travail…
Le thème choisi fait du bien en cette période « compliquée ».
Pour ma part, je ne donne jamais de thématique aux artistes que je sollicite pour les différents concours que j’organise. Je trouve que c’est restrictif et car cela peut brider la créativité. Le thème que vous avez choisi est bien : il est très large et il y a énormément de messages qui peuvent passer à travers le prisme de la photo.
Karine Paoli : C’est l’optimisme ! Tous les matins je me lève en me disant que ça va être une super journée : qu’est-ce que je vais apprendre ? Quelles belles rencontres vais-je faire ?
Et puis, c’est de toujours croire aux projets ! Surtout les plus fous !
La vie me l’a prouvé à plusieurs reprises que lorsque l’on veut quelque chose très fort, avec beaucoup de travail (il n’y a pas de secret), de la chance (il faut parfois la provoquer) et l’enthousiasme (avec lequel on parle du projet qui nous anime et qui nous met des papillons et des étoiles dans les yeux), alors oui ! Je pense qu’à un moment donné, si c’est vraiment ce que l’on croit et que l’on veut au plus profond de soi-même, ça marchera ! J’en suis convaincue et ça vaut aussi bien en tant que photographe, qu’en tant qu’artiste, mais aussi en tant qu'entrepreneur.
Crédit photo : ©TheCrazyFrench2019 pour PARISARTISTES # 2019
« Une spéciale dédicace à Claire Gagnaire qui a compris la passion qui m’animait, parce que nous partageons cette même passion, cette énergie qui arrivent à fédérer des équipes et à déplacer des montagnes pour des projets fous. »
Ne jamais lâcher ! Voilà, ce que je pense au quotidien pour réaliser nos rêves, c’est si important !
Karine Paoli : Paradoxalement, 2020 a été pour moi une année géniale. Beaucoup d’amis artistes se sont repliés sur eux-mêmes, ont mal vécu cette période de façon très compliquée et ça je l’entends.
Cela n’a pas été facile non plus, surtout pendant le premier confinement, où nous avons dû gérer, enfermer un nouveau quotidien. A gérer aussi bien les devoirs des enfants, le télétravail avec les visioconférences qui s’enchaînaient les unes avec les autres, etc…
Pour moi, cela a été une période dans laquelle je me suis retrouvée au niveau de ma créativité. J’ai une activité professionnelle qui me prend beaucoup de temps, mais j’ai su gérer le côté professionnel et artistique, en trouvant les meilleures périodes pour que tout se mette en place comme les pièces d’un puzzle géant.
Donc oui, les sorties et voyages furent limités, faire de nouvelles photos au bout du monde me manque terriblement. Mais à côté de cela, j’ai pu voir ma ville sous un autre angle, un Paris désert, silencieux, sans pollution, ….
J’ai pu voir Paris sous la neige, il y a quelques semaines encore, entendre le rire des enfants dans ma cour qui faisaient une bataille de neige, ou retrouver un bonhomme de neige au milieu d’un parc… La magie peut être partout si on sait la voir l’apprécier avec des petits bonheurs au quotidien, grâce à un regard optimiste !
C’est ce que je vis encore aujourd’hui, avec mon côté autodidacte qui m’a permis de m’aguerrir aux nouvelles techniques de la digitalisation des lieux et de réaliser, avec mon imagination débordante, de nouveaux projets que j’affine souvent les week-end, avec l’esprit détaché parce que je fais ce que j’aime ! Apprendre, comprendre et créer…
En effet, j’ai plein d'idées et souvent, une idée en entraîne une autre et j’adore, cela me nourrit artistiquement et intellectuellement. Voilà, pour résumer, ce que j’ai apprécié lors de cette année 2020 et 2021 en sera, j’en suis certaine, le prolongement logique.
Et comme meilleure preuve de cela, l’exposition virtuelle organisée à la mairie du 9ème arrondissement de Paris avec la digitalisation des salons en parallèle de la véritable exposition des 5 femmes photographes sélectionnées pour Objectif FEMMES que je vous invite à venir (re)découvrir du 7 au 19 septembre prochains.
Crédit photo : ©KarinePaoli 2021 – « PoeticHeart HugMe » - Paris au Grand Cœur -
Pour répondre à votre question, j’avoue que j’ai des photos qui me touchent particulièrement, parce que ce sont des tranches de vie(s) vraiment particulières, qui ont marqué mon existence, avec des émotions qui me sont propres, intimes, que j’avais envie de partager. Et comme je compte vivre longtemps (je touche du bois), ma galerie photo risque d’être assez vaste… À suivre pour une belle exposition rétrospective au grand palais, en virtu’Elle et/ou en réelle (l’espoir fait vivre, n’est-ce pas ?)
Karine Paoli : En fait… J’en ai beaucoup…
Je ne vous ai pas encore parlé du projet Hug me concept... c’est un projet photographique de vie, qui a pour but d’immortaliser une tranche de vie et de la dédicacer à quelqu’un qui vous est cher. Ces portraits (toujours en noir et blanc) sont des témoignages tournés vers l’Humain et la bienveillance.
Déjà plus de 3200 personnes ont tenté l’expérience de passer devant mon objectif et de dédicacer leur HUG pour la ou les personnes de leur choix qu’ils ont envie de serrer dans leurs bras. C’est l’occasion, à chaque fois, de faire de magnifiques rencontres. Des tranches de vie extraordinaires. Des échanges, des histoires… Quand je serai très vieille, j'écrirai un livre parce que grâce à ce projet artistique, il y a eu un bébé Hug Me, il y a eu des réconciliations : entre une maman et une fille qui s’étaient fâchées. Il y a des histoires d’amour qui se sont créées grâce à ce projet. Voilà la double lecture de ce projet tourné vers l’Humain ; ces êtres humains qui vont prendre le temps de se dire leurs sentiments et de les mettre sur papier glacé grâce à mes portraits.
Comme j’aime à le dire « A suivre »…
Les 3 petits points ont leur importance dans ma vie et aussi avec le Hug me…, cela veut dire en « Paoli dans le texte » : « Tournez-vous vers le futur et souriez à la vie ! »…